
La xénogreffe
Le don d'organe accuse un récession depuis 5 ans : pour
1995 4 880 patients en attente de greffe. 2 856 ont pu en bénéficier.
Pour sauver ces malades deux voix sont envisageables : des organes
bio artificiels ou la transplantation d'organes prélevés chez
d'autres animaux. L'idée de guérir un homme en lui greffant
l'organe d'un animal remonte en 1906. Le chirurgien lyonnais Jaboulay implanta
en dérivation un rein de porc et un rein de chèvre à
deux patients atteints d'insuffisance rénale. Tentative malheureuse ;
Quel animal choisir ?
Les primates ne sont plus candidats :
- les risques infectieux sont trop grands ;
- faible fréquence de reproduction et temps de croissance trop
long (7 à 10 ans) ;
- trop peu de donneurs potentiels ;
- les primates supérieurs sont protégés ;
Les atouts du porc
Immunologistes, chirurgiens, cliniciens sont d'accord.
Cet animal obtient l'aval oecuménique de toutes les religions. Il
est proche de l'homme par sa physiologie et par son anatomie. De plus des
protéines issues du porc sont déjà depuis longtemps
utilisées en thérapie :
- diabétiques traités à l'insuline porcine
- son héparine est un des anticoagulant les plus employés
A terme des risque infectieux moindres
La greffe à long terme d'un organe d'une espèce
à une autre crée une situation biologique nouvelle, aux conséquences
peu prévisibles. Il se pourrait cependant que l'emploi d'organes
de porc comporte, à terme un risque infectieux moindre que celui
moindre que celui d'organes humains, prélevés chez des personnes
décédées dont l'histoire médicale n'est pas
clairement connue.
Une forme proche mais une carte génétique dissemblable
Mais s'il est proche physiologiquement de l'homme, il l'est beaucoup
moins au plan phylogénique ce qui pose au moment de la transplantation
un problème jusque là encore insoluble, celui du rejet suraigu
des organes vascularisés, tels que le rein, le coeur qui semblent
les plus intéressants.
Le rejet suraigu : la première étape à franchir
dans les premières heures
Pour comprendre le phénomène, des études ont été
menées sur des combinaisons d'espèces discordantes telles
que cobaye/rat, mais les résultais ne sont pas facilement extrapolables
à la xénogreffe chez l'homme. Les travaux effectués
sur le porc sont plus prometteurs.
Il est déclenché par :
- la liaison d'anticorps naturels de l'hôte à des antigènes
du xénogreffon,
- ce qui active les cellules endothéliales des vaisseaux sanguins
et le système du complément ;
résultat : apparition d'une thrombose, d'une inflammation
et la destruction rapide du greffon.
1. les anticorps naturels en action : Gal Alpha attaque le xénogreffon
Tout d'abord interviennent des anticorps naturels du receveur
dirigés contre l'organe donneur. Nous formons et stockons ces anticorps
(xénogéniques) tout au long de notre vie, contre ce que l'on
mange, ce que l'on côtoie, ce que l'on respire. Ils sont d'une grande
variété et il se trouve que certains d'entre eux reconnaissent
spécifiquement certains antigènes du porc. Le principal antigène,
responsable à 80 % du rejet suraigu dans le cas du porc, a été
identifié ; Il s'agit de gal-alpha-1-3-gal. Ils sont
fabriqués par 1 % des lymphocytes B chez l'homme.
Lors de cet événement, les anticorps naturels du receveur,
combinés au xéno-antigènes du greffon activent la voix
direct du complément. Résultats effets pro-inflammatoires
ou procoagulants multiples.
2. les cellules endothéliales se rétractent > caillot
de sang > mort du greffon
Au repos les cellules endothéliales des vaisseaux forment une
barrière au passage des cellules sanguines et constitue une surface
anticoagulante. Au cours du rejet suraigu d'une xénogreffe, la fixation
des anticorps naturels et l'amorce de la cascade du complément entraînent
une puissante activation des cellules endothéliales. Elle aboutit
à la perte des propriétés anticoagulantes. Une thrombose
(caillots dans un vaisseau sanguin) se déclenche qui conduit rapidement
à la nécrose du greffon. Le phénomène de se
déroule en deux phases. La première dure 30 minutes et la
seconde quelques heures.
Le rejet aigu xénogénique : la seconde étape
à franchir dans les 10 jours
Si le xénogreffon survit au rejet suraigu, il reste
confronté au rejet aigu, comme dans le cas d'une allogreffe. Ce rejet
survient cet à 10 jours après la greffe.
Juguler le rejet suraigu : des phénomènes connus
et d'autres ignorés
La prévention du rejet suraigu impose de lutter
contre les phénomènes vasomoteurs et thromboniques. Mais du
fait de la brutalité de la nécrose on doit aussi envisager
l'intervention de phénomènes inconnus qui pourraient surgir
une fois le rejet suraigu atténué ou retardé par des
moyens thérapeutiques.
Première voie explorée. Les traitements préventifs
du rejet suraigu ont plusieurs cibles :
- Ils peuvent agir sur les anticorps naturels du receveur
- sur les xéno-antigènes du greffon
- sur le complément du receveur
- et enfin sur les cellules d'adhésion du greffon.
Seconde voix explorée : l'inhibition du complément.
Certaines substances pharmacologiques sont susceptibles de le faire, comme
le venin de cobra à dose infratoxiques. La survie du greffon a été
ainsi portée de 90 minutes à 4 jours. Mais le seuil de toxicité
du venin de cobra est trop proche de celui de son efficacité pour
que l'on puisse l'employer chez l'homme.
Troisième voie : utilisation de protéines régulatrices
du complément qui permettraient de limiter l'inhibition du complément.
Cependant cette inhibition, bien que primordiale risque de ne pas être
suffisante.
La rupture de la barrière endothéliale sont en parties
provoquées par d'autres stimuli encore inconnus.
Et si on produisait des animaux transgéniques modèles
d'études des xénogreffes ?
Des souris, des rats, des lapins et des porcs transgéniques...
dont les organes seraient utilisés comme greffons pour l'homme pour
évité le rejet suraigu. De nombreuses expériences sont
réalisées dans ce sens mais les résultats obtenus sont
a tempérer.
Un porc transgénique = 150 000 frs
Les investissements nécessaires à l'obtention
de porcs transgéniques sont lourds. Une porcherie coûte au
bas mot 1,5 millions de francs. Un porc transgénique revient à
150 000 fr. Les chercheurs français ont donc décidés
de travailler sur des souris (, des rats (2 000 fr) et des lapins (20 000
frs ; la production de rats transgéniques est acquise. Celle
des lapins est en cours. Les associations de transgènes les plus
efficaces devraient être déterminées en 1997. La production
de porc transgénique viendra plus tard.
Conclusion
La complexité physiopathologique du rejet xénogénique
risque de rendre insuffisantes les différentes approches. D'autres
difficultés risquent d'apparaître. On peut raisonnablement
penser qu'il faudra associer plusieurs thérapeutiques, intervenants
à différents niveaux, pour réussir une xénogreffe.
BIOFUTUR juillet-août 1996